vendredi 16 mars 2012

Tim Burton, un artiste de l'intime

Tim BurtonLors de la conférence de presse donnée pour l’exposition qui lui est consacrée à la Cinémathèque française, Tim Burton est revenu sur son parcours professionnel, ses premiers courts-métrages, Disney... Mais également personnel, en nous livrant sa vision intime de la vie et de l’art. Rencontre avec un artiste aux multiples talents, pour qui l'art est indissociable de ses sentiments les plus intimes.


Les Noces funèbres - Tim BurtonLorsque les commissaires d'exposition de la cinémathèque française ont proposé à Tim Burton de venir s’exposer à Paris, celui-ci a immédiatement accepté. Parce que pour lui la Cinémathèque française, c’est d’abord Mélies, que la France est un pays dans lequel on « ressent l’amour des gens pour le cinéma, qui aiment en parler et qui, même s’ils n’apprécient pas vos films en parlent d’une si belle façon » ce qui tranche avec « le cinéma business » de Los Angeles. A l’occasion de la présentation de l’exposition consacrée à l’ensemble de son œuvre, à la Cinémathèque, Tim Burton a rappelé qu’il ne voulait qu’une seule ville en Europe pour l’accueillir et il a choisi Paris où il se sent  « le bienvenu». Habitant pourtant Londres, le réalisateur refuse d’y voir installée l’exposition imaginée par le MOMA de New-York en 2009, à cause dit-il « de la presse qui est absolument catastrophique là-bas » et qui probablement n’hésiterait pas à écrire « des horreurs » sur lui et son travail, ce qu’il veut « éviter à ses enfants ». Ses enfants, le réalisateur les évoque dans presque toutes les interviews qu’il donne, ils habitent son esprit et son travail le plus récent. Il leur a transmis cet amour pour les récits peuplés de monstres qu’il a découvert dès l’âge de 3 ans et qui l’aidaient à « s’échapper » de sa propre enfance, mais aussi à « comprendre le monde qui l’entourait ». Cet univers « insulaire dans lequel vous êtes en quelque sorte coupé du reste du monde », un « monde de désillusion » qui fut celui de son enfance à Burbanks « antichambre de Los Angeles ».

Big Fish - Tim Burton, Ewan McGregorC’est surtout à travers les dessins, des centaines, dont l’artiste ne se « souvenait plus de l’existence », retrouvés par les conservateurs du MOMA, dans sa maison d’enfance, son ancienne école ou chez lui dans des cartons ou des tiroirs, que Burton trouvera un moyen d’évasion, surtout un moyen de communication. Lui qui se dit à plusieurs reprises, ne pas être « une personne très verbale » trouvera dans le dessin et dans la réalisation de films, « un moyen de communiquer » et « d’explorer son subconscient sans même avoir à parler ». C’est cette idée d’instinct, de subconscient primant sur l’intellect qui est au centre du processus de travail du maitre. Il dessine ce qui l’habite, en mode écriture automatique, sans chercher à plaire à quelqu’un, sans s’interroger sur le sens précis de ces derniers ou ce qu’ils deviendront dans le futur. L’essentiel pour Burton est de « créer », de « prendre le temps au moins une fois par jour de créer quelque chose de personnel ».

Son mode opératoire dépend entièrement de ses sentiments les plus intimes et ce sont eux qu’il insuffle à ses dessins.« Il faut dessiner ce que tu es, ce que tu ressens» lui disait un de ses professeurs à Cal Arts, l’école d’art Créée par Disney pour former ses futurs animateurs. Cette nécessaire implication affective dans tous les projets qu’il entreprend, il ne pourra jamais y renoncer, ce dont il s’apercevra dès ses débuts chez Disney. Ce dernier revient sur cette collaboration de façon nuancée, en reconnaissant que la firme lui a « donné de grandes opportunités » en l’aidant à réaliser plusieurs projets, comme Hansel et Gretel, mais également de grande frustrations, en voulant par exemple à la fin de son court-métrage Vincent, faire aller jouer le petit garçon au base-ball, « ce qui était en quelque sorte, passer à côté du propos central du film».

Edward aux mains d'argent - Tim Burton, Johnny Depp, Vincent PriceLes mêmes thématiques hantent les films et le discours du cinéaste, qui avoue ne pas « pouvoir s’illustrer dans tous les genres cinématographiques », celle surtout de l’enfance vue comme un art, car c’est à travers ses yeux que la beauté dissimulée derrière le monstrueux se révèle. C’est cette enfance qui habite encore le réalisateur qui s’est toujours senti proche de ses monstres « mal perçus », qui « symbolisaient la façon dont il se sentait ». C’est surtout la liberté propre à cet âge de la vie, que l’homme a su conserver, liberté d’évoquer tous les sujets, la violence, la mort, sans d’autre arrière pensée que « d’exorciser ses peurs, ses joies, ses drames à travers la création. »

Par Camille Esnault (08/03/2012 à 10h34)

Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire

Related Posts Plugin for WordPress, Blogger...