vendredi 17 février 2012

Howl ou la rencontre manquée du cinéma et de la poésie

HowlLe film Howl a de nombreux points communs avec Harvey Milk sorti en 2009, la présence de Gus Van Sant (producteur), celle de James Franco et l'arrière plan, celui du San Francisco des gaies et des lesbiennes. Ne vous trompez pas, la comparaison s'arrête là. Howl n'a rien de l'engagé et émouvant Harvey Milk, sa tentative d'adaptation à l'écran tombe complètement à l'eau.

Allen Ginsberg publie en 1956 un poème intitulé Howl. Il est qualifié d'obscène par les milieux conservateurs qui intenteront, un procès à l'éditeur, Lawrence Ferlinghetti. Le film Howl entrelace plusieurs récits, celui du procès, de l'interview d'Allen Ginsberg qui se remémore ses jeunes années, de la lecture du poème par le poète à la Six gallery de San Francisco et des séquences d'animation inspirées par cette lecture. Howl n'est pas l'histoire du procès ou du processus de création d'Allen Ginsberg, il est le poème lui-même. Ce dernier est, en effet, présent dans sa totalité à travers une lecture hyperarticulée et rébarbative menée par James Franco. Lecture appuyée par des images d'animation très abstraites et qui n'ont d'intérêt ni pédagogique, ni esthétique. On attend alors que ça passe, pour reprendre le cours de l'interview du Ginsberg barbu. Parce que finalement ce qui nous intéresse dans le film de Rob Epstein et Jeffrey Friedmann, c'est le parcours de l'homme derrière Howl, un des artistes majeurs de la Beat Generation. Mais malheureusement on ne reste pas non plus très longtemps en sa compagnie, arrachés par les images du procès de l'éditeur, en cours. Voilà le gros défaut de Howl, les réalisateurs en ont fait une sorte de patchwork. Pour sûre il y a de jolis morceaux, comme la réflexion de Ginsberg sur ce qu'est finalement la réalité sociale, dans une Amérique des années 50 où les gais doivent promettre de devenir hétéro pour échapper aux électrochocs, mais pas assez développés pour tenir un spectateur en haleine pendant 1h24.

Les deux réalisateurs, normalement habitués aux documentaires créent ici une œuvre abstraite qui laisse le spectateur dans le flou. Peut-être ont-ils voulu transmettre l'esprit du poème et de l'époque, de la Beat Generation, en faisant comme elle, en déconstruisant les formes existantes. Si ce procédé a fonctionné pour le poème Howl, c'est un peu plus difficile pour le film Howl. On a parfois l'impression d'assister à une explication de texte laborieuse, ce qui s'estompe avec les séquences d'interview bien plus solides et profondes que le reste du film, portées par un James Franco très bon dans cet exercice difficile. Howl aura au moins le mérite de montrer l'étendu des talents d'acteur de James Franco qui est la lumière de cette ensemble brumeux.

Par Camille Esnault

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